Un état des lieux national pour comprendre et structurer la filière
Chaque année, près de 22 millions de tonnes (*) de déchets issus de la déconstruction deviennent potentiellement disponibles en France pour le réemploi ou le recyclage. Pourtant, cette ressource reste largement sous-exploitée. Le diagnostic « Produits-Équipements-Matériaux-Déchets (PEMD) », obligatoire depuis juillet 2023, change la donne : il structure la connaissance des gisements, fiabilise la donnée et ouvre la voie à une nouvelle économie circulaire du bâtiment.
C’est dans cet esprit que Afleya, éditeur de la plateforme Akibo, publie son Observatoire du diagnostic PEMD 2024. Basé sur la base de données de diagnostics réalisés avec l’outil Akibo et sur une modélisation nationale à partir des données publiques Sitadel2, cet Observatoire dresse pour la première fois un état des lieux chiffré, territorial et opérationnel du diagnostic PEMD en France.
Un marché en structuration rapide
Selon la modélisation Afleya-Sitadel2, près de 7 400 opérations auraient été potentiellement soumises à diagnostic PEMD en 2024, représentant 54 millions m² et un gisement estimé à 14 millions de tonnes de matériaux.
Ces ordres de grandeur illustrent l’ampleur du chantier : le diagnostic PEMD constitue désormais un socle commun de données environnementales sur la déconstruction, la rénovation et la réhabilitation du bâti.
La répartition géographique des opérations éligibles confirme la portée nationale du dispositif. Les rénovations représentent environ 68 % des opérations modélisées, traduisant la montée en puissance du diagnostic dans les stratégies de revalorisation du parc existant.
Des données de terrain grâce à Akibo
L’Observatoire s’appuie aussi sur les diagnostics réalisés à l’aide de la plateforme Akibo, qui agrège plus de 3 millions de tonnes de matériaux caractérisées en 2024.
Les bailleurs sociaux et collectivités constituent plus de 60 % des maîtres d’ouvrage prescripteurs, traduisant un engagement fort du secteur public.
Les données issues d’Akibo confirment la diversité du patrimoine concerné — logements collectifs, bâtiments tertiaires, équipements publics ou industriels — et la dynamique territoriale : l’Île-de-France, l’Auvergne-Rhône-Alpes et le Grand Est concentrent à elles seules 43 % des projets.
Réemploi, recyclage : la réalité des gisements
Les diagnostics PEMD proposent une valorisation matière élevée : 76 % en moyenne, dont 8 % en réemploi et 43 % en recyclage. Certains flux atteignent des performances remarquables, comme l’acier structurel (91 % de valorisation 3R (**), dont 27 % en réemploi) ou les sanitaires céramiques (56 %).
D’autres, comme le bois de classe B ou les faux plafonds, présentent encore des marges de progression, soulignant le besoin d’accompagnement des filières.
Entre 2024 et 2025, la part des matériaux réemployables a légèrement reculé dans les diagnostics sous Akibo — autour de 4 % début 2025 — traduisant un ajustement entre ambitions initiales et contraintes opérationnelles. Le potentiel reste toutefois considérable : certaines familles de matériaux (menuiseries, équipements intérieurs, sanitaires…) sont quasiment toujours proposées au réemploi par les diagnostiqueurs.
Le diagnostic PEMD : bien plus qu’une obligation
Loin de se limiter à une contrainte réglementaire, le diagnostic PEMD devient un outil stratégique de pilotage environnemental et économique. Il fournit une vision claire et partagée des gisements, permettant :
- D’anticiper les flux de matériaux et de sécuriser les projets,
- D’optimiser les budgets de curage et de déconstruction,
- De prioriser les actions d’économie circulaire,
- Et de capitaliser la connaissance patrimoniale sur le long terme.
Chaque diagnostic enrichit une base de données collective sur les ressources contenues dans le bâti existant. Ce patrimoine d’informations alimente désormais des stratégies globales de réemploi et de réduction des impacts environnementaux à l’échelle d’un territoire, d’un parc ou d’un maître d’ouvrage.
Niveau européen : vers une normalisation du pré-déconstruction
Au-delà de la France, le sujet est traité au niveau européen via European Committee for Standardization (CEN) : en particulier le comité technique CEN/TC 350 « Sustainability of construction works » et sa sous-commission CEN/TC 350/SC 1 « Circular economy in construction ».
Un groupe de travail spécifique est dédié aux audits pré-déconstruction et pré-revalorisation (“pre-demolition / pre-redevelopment audit and evaluation”), afin de poser les bases d’un standard européen. Afleya y participe pour représenter la France.
Cet effort de normalisation vise à :
- Définir un cadre commun et des définitions de la circularité, du réemploi, du recyclage et de la mise hors d’usage.
- Élaborer une méthodologie d’audit avant démolition ou rénovation lourde, intégrant l’inventaire des matériaux, la quantification des flux, l’estimation des taux de réemploi/recyclage et la prise en compte des impacts carbone évités.
- Créer des indicateurs standardisés et des formats de données « circulaires » pour garantir l’interopérabilité et la traçabilité des matériaux issus du bâti.
Parallèlement, dans le cadre du Circular Economy Action Plan de l’UE et de la révision des textes associés (dont le futur «Circular Economy Act»), une consultation publique est en cours. Le groupe de travail relatif à la construction a fourni une réponse collective à cette consultation, insistant sur :
- L’importance d’un audit systématique avant démolition afin de maximiser le réemploi des matériaux,
- La nécessité d’un référentiel harmonisé européen pour garantir la qualité des diagnostics et la fiabilité des données,
- L’intégration des flux de matériaux dans les processus d’éco-conception et leur traçabilité à travers des plateformes numériques interopérables.
- L’intégration de ces audits et diagnostics dans les marchés publics et les obligations RSE/ESG.
Ainsi, le travail des acteurs français comme Afleya s’inscrit pleinement dans cette dynamique européenne : le diagnostic PEMD devient non seulement un instrument national, mais aussi un maillon de la mise en œuvre de la circularité au niveau transnational.
Vers un diagnostic PEMD « augmenté »
L’avenir du diagnostic PEMD se joue dans la data et l’interopérabilité. La digitalisation portée par Akibo transforme le diagnostic en un véritable outil opérationnel de pilotage. Connecté aux plateformes de réemploi et à la base gouvernementale PEMD, l’outil permet d’éditer des livrables opérationnels (fiches matériaux, cartographies de gisements), de calculer automatiquement des indicateurs réglementaires ou RSE (labels, CSRD) et de relier les acteurs de la filière via un annuaire intégré.
Cette approche du « diagnostic PEMD augmenté » illustre une évolution majeure : l’exploitation des données ne se limite plus à l’analyse du bâti, mais ouvre la voie à une gestion circulaire des ressources.
Un appel collectif à la montée en compétence
Pour Afleya et la communauté des utilisateurs d’Akibo, le diagnostic PEMD représente désormais une brique essentielle de la transformation circulaire du bâtiment. L’enjeu n’est plus seulement de diagnostiquer, mais d’apprendre à mobiliser les données, mutualiser les retours d’expérience et piloter les décisions à partir d’indicateurs partagés.
L’Observatoire 2024 pose ainsi les fondations d’une intelligence collective des ressources. Il rappelle qu’au-delà des tonnes et des ratios, la réussite de la transition circulaire dépend avant tout de la qualité de la donnée et de la coopération entre les acteurs.
Nota * : https://filieres-rep.ademe.fr/filieres-REP/filiere-PMCB
Nota ** : Valorisation 3R : Réemploi- Réutilisation- Recyclage
→ Demander l’Observatoire du diagnostic PEMD 2024 sur la rubrique ressources/ nos outils du site afleya.com
→ En savoir plus sur Akibo : la plateforme du diagnostic PEMD augmenté.
